"Sittelle, l'envol" 

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La sittelle torchepot est l’un des oiseaux fidèles de mon jardin. Chaque année, un couple revient s’installer dans une cavité d’arbre ou de tronc, choisie avec soin pour accueillir leur nid. J’ai passé de longues heures à les observer, assistant à toutes les étapes de leur cycle de reproduction : le mâle qui chante en haut des arbres pendant que la femelle aménage le creux avec des brindilles, le trou d’entrée qu’elle réduit méticuleusement avec un mélange de terre glaise et de salive, la ponte, puis le nourrissage et enfin les premiers envols des jeunes.

Peu à peu, une forme de confiance s’est installée entre eux et moi. Ces oiseaux, vifs et intelligents, avaient compris que je ne représentais aucun danger. Un hiver, alors que le froid était mordant, je me suis postée à l’affût dans l’ancien poulailler, à quelques mètres seulement d’une vieille souche dans laquelle j’avais déposé quelques graines de tournesol. La sittelle fut la première à arriver. Elle inspecta attentivement la souche, y trouva les graines, en saisit une, puis s’envola en un éclair.

Les mésanges bleues et charbonnières, suivies du rouge-gorge, se succédèrent, emportant leur butin vers un noisetier voisin pour le déguster à l’abri. Les pinsons, eux, préféraient décortiquer les graines sur place. Mais dès que la sittelle revenait d’un vol rapide, tous les autres s’écartaient immédiatement.

Elle ne restait jamais longtemps. Elle choisissait une graine avec précision, puis reprenait son envol dans la lumière froide de l’hiver. Cette image – celle de la sittelle, ailes tendues, s’élevant dans l’air givré – m’est restée en tête. Après plusieurs jours d’affût, j’ai enfin capturé quelques clichés exploitables malgré la faible luminosité et la rapidité du sujet. Grâce à la photo, j’ai pu saisir ce que l’œil seul ne percevait pas : les plumes translucides déployées en éventail, les détails sous les ailes, les nuances exactes du plumage.

Avec ces précieuses références en main, j’ai imaginé la scène que je voulais peindre. Le tableau a été réalisé sur un panneau de médium brut, d’abord à l’acrylique, puis retravaillé à l’huile pour accentuer les contrastes dans la texture de la souche, les grandes plumes de l’oiseau et la lumière du fond.

— Laurence Saunois